piątek, 1 marca 2019

Frédéric Chopin, est-il né le 22 février ou le 1 mars?


Voici la question qui a fait couler beaucoup d'encre durant les deux derniers siècles. Dans le livre paroissial de Brochów le curé a noté le 22 février comme le jour de naissance de Frédéric. La même date figure sur la plaque commémorative dans l’église de la Sainte Croix à Varsovie. Pourtant...

Epitaphe de Frédéric Chopin à l'église de la Sainte Croix


Dans une lettre du début de l’année 1837, sa mère a écrit : « Mon cher Frédéric, les deux jours de mars, le 1 et le 5, s’approchent, et moi, je ne peux pas te serrer dans mes bras... ».
Le 5 mars est facile à déchiffrer, c’est bien la Saint Frédéric, mais pourquoi le 1 mars? Or, selon les membres de la famille Chopin, c’était bien le jour de la naissance du compositeur. Lui-même écrira dans sa lettre adressée à la Société littéraire polonaise à Paris, présidée par le prince Adam Jerzy Czartoryski, qu’il était né le 1 mars 1810.
Le même jour est mentionné dans presque tous les articles qui ont paru dans la presse polonaise dans la seconde moitié du XIX siècle. Il est donc cité d’abord par Józef Sikorski, journaliste et critique musical, l’auteur de l’article écrit juste après la mort du compositeur. L’article qui commence par cette phrase : « Frédéric François Chopin est né le 1 mars 1809 à Żelazowa Wola, un village à deux lieues de la ville de Sochaczew et à six lieues de Varsovie. »
L’auteur d’un autre texte qui retrace la vie et l’oeuvre de Chopin, Maurycy Karasowski... Attendez! Qu’est-ce que je viens d’écrire? Qu’il est né le 1 mars 1809 ? Eh, oui. C’est bien ça. Le problème avec la date de naissance de Frédéric ne se limite pas à la date journalière! On n’est même pas sûr de l’année de sa naissance.
Tous les auteurs avant 1879 ont mentionnée le 1809 comme l’année de la naissance du compositeur. Après Sikorski, c’était Karasowski, et surtout Julian Fontana qui préparait les émissions de ses oeuvres et qui, dans l’introduction aux « Oeuvres postumes » (Berlin, éd. Schlesinger), en 1855, a écrit :
« À l’âge de 19 ans, en 1828*, il composa pour nous le Rondo à 2 pianos qui forme la 8ème livraison de ce recueil. » Et il a ajouté ceci dans la notice marquée par l’astérisque : « Chopin est né le 1 Mars 1809 et non 1810 comme le disent par erreur presque toutes ses biographies. » L’homme qui l’a écrit connaissait Frédéric depuis son enfance, était son ami et, en quelque sorte, son secrétaire. Comme rédacteur des « Oeuvres » de Chopin, il agissait en étroit contacte avec la famille du compositeur. Sa grande soeur Louise, celle qui était sa confidente durant tout sa vie, était morte en octobre 1855,  mais la mère était encore vivante, de même que l’autre soeur, Isabelle, qui tenait en main les affaires. Auraient-elles ignoré la date de naissance de leur fils et frère? Et pourtant Isabelle n’a pas réagit en voyant l’année « 1809 » gravée sur la plaque commémorative érigée par l’Association musicale de Varsovie. La plaque qu’on a mise sur le pilier de l’église de la Sainte Croix où, le 1 mars 1879, on avait enchassé l’urne avec le coeur de Frédéric.
Si on s’etait limité uniquement à l’opinion de la famille Chopin, le problème ne se serait jamais posé. Mais la tradition orale a dû être confrontée aux documents écrits. Comme je l’ai déjà signalé, dans le livre paroissial de l’église de Brochów où a eu lieu le baptême de Frédéric, le curé a écrit qu’il avait été né le 22 février. Le même jour est mentionné dans l’acte de naissance donc un document de l’état civile dressé par un autre curé de la même église. Les deux documents ont été dressés le même jour, le 23 avril 1810. Maintenant, imaginez vous une telle situation. Le vicaire de la paroisse est en train de ratrapper les manques dans le livre paroissial. Il commence à écrire l’acte de baptême de Frédéric, mais la mémoire lui fait défaut,  il demande donc à l’autre prêtre (celui qui va signer ensuite l’acte de naissance) : « C’était quand la naissance du petit des Chopyns (sic!)? » Et l’autre de lui répondre : « Il y a huit semaines à peu près. » Et les huit semaines sont plus proches du 22 février que du 1 mars, alors...
Il est à noter que ni Frédéric ni sa famille n’avaient jamais besoin de la copie de son acte de naissance. C’est pourquoi, ils ignoraient cette erreur commise par les deux curés.
Ce qui est écrit mérite plus de confiance, paraît-il. C’est pourquoi en 1935 on a changé la date de naissance sur la plaque à la Sainte Croix contre celle du 22 février 1810.
Il y a pourtant un « mais »... J’ai parlé de la lettre écrite au prince Czartoryski où Frédéric de sa propre main a écrit : Né le 1 mars 1810 ». 1810 ! Comment expliquer cela? C’est un autre ami du compositeur qui a essayé de le faire. Franz Liszt a écrit dans son livre qui était la première biographie de Chopin que celui-ci ignorait la date exacte de sa naissance et qu’il l’avait calculée tout simplement grâce à l’inscription gravée sur la montre en or reçue en cadeau quand il était enfant : « Mme Catalani à Frédéric Chopin âgé de 10 ans, à Varsovie, le 3 janvier 1820 »
Quand on a un ambarras de choix, il faut quelqu’un qui tranche le problème. C’est donc l’Institut national Frédéric Chopin qui a trouvé un compromis. On a gardé la date journalière fêtée par la famille, mais l’année est celle trouvée dans les documents de la paroisse.
Ainsi, jusqu'à nouvel ordre, le plus grand compositeur polonais Frédéric Chopin est né le 1 mars 1810.

Et voici un petit concert pour fêter son anniversaire
"Grande fantaisie sur des airs polonais" op. 13 
 au piano Władysław Kędra

 accompagné
de l'Orchestre Symphonique de la Filharmonie Nationale
sous la direction de
Witold Rowicki



środa, 31 grudnia 2014

Bonne Année 2015 !!!

Je souhaite à tous ceux qui viennent consulter ce blog,
que cette Nouvelle Année qui s'approche 
vous offre l'occation à réaliser tous vos rêves, 
même les plus fantasques  ;-)  !!!




sobota, 3 maja 2014

Le Varsovie du père - Nicolas Chopin en Pologne

Nicolas Chopin, le père de Frédéric, est né le 15 avril 1771 à Marainville, en Lorraine, en France. Il a fait ses études au Collège des chanoinesses de Remiremont, à Tantimont, à l'école qui préparait de jeunes gens au métier d'enseignant et de prêtre. 
Le propriétaire du domaine de Marinville à partir de 1780 était un représentant d'une grande famille noble polonaise, Michal Jan Pac. Obligé de fuir la Pologne de Stanislas Auguste Poniatowski, c'est en 1775 qu'il obtient la nationalité française. Son secrétaire et gérant du château était Adam Weydlich. Celui-ci ainsi que sa femme Françoise Nicole Schelling, ont pris beaucoup de sympatie pour Nicolas. Elle lui enseignait les règles du savoir-vivre, la calligraphie, la musique, la langue allemande et le français littéraire. Son époux lui a appris les bases de la langue polonaise.
En 1785, après la mort de Michal Pac, le chateau est vendu, et le couple Weydlich se prépare au retour en Pologne, ce qui a eu lieu en 1787.
Dans la Gazette de Varsovie du 27 février 1788 on a pu lire une annonce sur la création par Adam Weydlich d'une pension pour jeunes filles. Son siège était dans la maison des pères augustains, au 1259 de la rue Nowy Swiat (actuellement le numéro 33). Il est bien probable que c'était le premier lieu de travail de Nicolas en Pologne. Il aidait le couple Weydlich en tant qu'enseignant de français. Il est aussi possible qu'au même temps, il était le précepteur des enfants de Weydlich: de Henryka, la fille, qui avait à l'époque 15 ans, et de son frère cadet, Michal  (9 ans).


à suivre

czwartek, 27 grudnia 2012

Les crèches de Noël

Toutes petites, on les trouve dans nos maisons depuis la première semaine du décembre. À Noël, on les cherche dans des églises. Petites ou grandeur nature, riches en personnages ou présentant uniquement la sainte famille, installées par les prêtres, elles font naître des émotions propres à cette fête...
Mais il y en a aussi qui attirent des foules, notamment des enfants qui, dans la folle époque des ordinateurs, cherchent du fabuleux dans du simple. Les crèches méchanos, comme celle de Varsovie, rue Miodowa, chez lez frères mineurs capucins. Riche d'une tradition de 64 ans, elle présente non seulement la naissance de Jesus, mais aussi des personnages historiques, le pape Jean Paul II, le béatifié Jerzy Popiełuszko, un prêtre assassiné par la milice communiste, des rois polonais, des généraux de l'armée polonaise de plusieurs époques.
Chaque année, de nouveaux personnages et éléments sont ajoutés. Sous le régime communiste, les adultes se précipitaient eux aussi pour voir la nouvelle version, en essayant d'identifier les nouveaux personnages, symboles de la résistance contre le gouvernement. C'était le temps où l'Église était l'unique institution où le pouvoir tolérait un brin de liberté d'expression...


La crèche se visite dans le sous-sol de l'église des frères capucins au 13, rue Miodowa,
tous les jours, du 26 décembre au 2 février, de 10h à 18h.

poniedziałek, 1 października 2012

Nowy Świat – la rue connue ou méconnue ?


La rue Nowy Świat fait partie de ce qu'on appelle la Voie Royale. Celle-ci relie le château des rois de Pologne se trouvant près de la Vieille Ville avec leurs résidences d'été qui, jusqu'au début du XX siècle, se trouvaient à l'extérieur de la ville de Varsovie: Palais Casimire, petit palais sur l’île au Parc de Łazienki et celui à Wilanów. La rue, sans être négligée par les touristes, ne leur est connue que des fenêtres des autocars, vu que le temps des visites est en général très limité. Je vous invite donc à descendre des bus et faire une petite promenade à pied.

Nous commençons notre visite par... la fin. Si les numéros des maisons débutent du côté de la Place Trzech Krzyży, pour les habitants de Varsovie historique c'était déjà une banlieue ou plutôt une campagne près de la ville avec rares bâtiments entourant les deux colonnes et la statue de Saint Népomucène du XVIII que nous connaissons aussi de nos jours. Elles sont placées devant l'église Saint Alexandre où se trouve le ciborium réalisé par Jan Norblin. L'église qui, pendant la II Guerre mondiale, le 5 juin 1943, fut témoin d'un évènement tragique provoqué par la nonchalance et un manque total d'imagination d'un jeune couple de résistants polonais. En négligeant complétement les principes de la vie clandestine et les ordres de leurs supérieurs, les jeunes gens ont invité leur familles et amis à la cérémonie de leur mariage. La Gestapo, elle aussi,  n'a pas manqué à « l'appel ». Plus de 90 personnes ont été arrêtées suite d'une dénonciation, dont la plupart fut torturée et exécutée... 

Dans sa partie sud, entre la Place Trzech Krzyży et le Rond Point Charles de Gaulle, la rue  Nowy Świat a gardé certains vestiges de sa beauté. Le bâtiment au numéro 3 est le plus ancien exemple d'hôtel bourgeois de style fonctionnel des années 1930. Le rez-de-chaussé et les caves étaient occupés d'un restaurant chic « Paradis » qui, après la guerre prit le nom de « Melodia » et fut un de préférés de la nomenclature du parti communiste. Les apparatchiks du Comité central du Parti Ouvrier unifié polonais n'avaient qu'à traverser la rue qui séparait le restaurant de leur siège, construit entre 1948-1952, appelé par les Polonais la « Maison Blanche » de la couleur de ses murs. Après les changements politiques intervenues en Pologne en 1989, ce bâtiment, un symbole de la tyrannie communiste est devenu un symbole de l'économie de marché, changé en premier siège de la Bourse des Valeurs de Varsovie.

Après avoir passé le rond-point, ayant regardé la copie du monument du Général de Gaulle que certains Varsoviens ont appelé « le général dansant » (si on est un peu sceptique quant à la statue, on aime bien la personne), et après être surpris par la vue d'un palmier (artificiel), pénétrons dans la partie principale de la rue Nowy Świat, celle qui a été presque complétement détruite en août et septembre 1944, pendant l'Insurrection de Varsovie. Tous les hôtels que vous y allez admirer ne sont donc que des reconstructions.  

Une carte postale de 1946 où on voit bien les ruines des hôtels de la rue Nowy Świat
À notre droite, au numéro 18, se trouve l'hôtel Branicki où, jusqu'à la II Guerre Mondiale, eut son siège l'Ambassade Britannique. C'est ici que, le 3 septembre 1939, se sont retrouvés des milliers de Varsoviens pour manifester leur joie après la proclamation de la guerre par l'Angleterre et la France. Un autre groupe manifestait son enthousiasme devant l'ambassade française qui se trouvait à l'époque dans le Palais Lubomirski (là où de nos jours s'étale une grande terrasse, à côté du Musée de la Terre).
Le plus important investissement du début du XX siècle fut caché des yeux du public dans la cour derrière le Palais Kossakowski, au numéro 19. C'était un grand bâtiment qui abritait une patinoire dont la longueur dépassait 50 mètres, accompagné d'un restaurant et d'un balcon pour orchestre. Hélàs, cette entreprise n'était pas de longue durée car créée sur des bases financières très faibles. Au bout de deux ans la patinoire fut transformée en grand restaurant. Les restes de cet immeuble ont servi dernièrement à l'aménagement des appartements de luxe, la Résidence Royale. Dans les années 1930, du côté de la rue, au même numéro, il y avait une « Parfumerie Française » de J. Turnemine.

Du côté paire cherchez  le numéro 32. C'est ici, dans l'hôtel Bobiński, qu'habitait, entre 1827 – 1837, le consul français Jacques Durand, occupant un vaste appartement de 8 pièces. Ami des Polonais, en 1831, pendant l'Insurrection de Novembre,  il a mis à la disposition du gouvernement polonais ses valises diplomatiques. C'est donc grâce à lui que les autorités russe et prussienne n'avaient plus de moyens de contrôler la correspondance gouvernementale polonaise et les Polonais pouvaient  négocier librement avec le gouvernement français une aide à l'Insurrection.  Hélas, les négociations n'ont abouti à rien. Seule la population française nous a montré un soutien moral dont l'exemple fut « La Varsovienne », un poème de Casimir de la Vigne qui, traduit vers le polonais , est devenu notre quasi hymne national.
Il s'est levé, voici le jour sanglant ;
Qu'il soit pour nous le jour de délivrance !
Dans son essor, voyez notre aile blanc ?
les yeux fixés sur l'arc-en-ciel de France !
Au soleil de juillet dont l'éclat fut si beau,
Il a repris son vol, il fend les airs, il crie :
Pour ma noble Patrie
Liberté : ton soleil ou la nuit du tombeau !

Polonais, à la baïonnette !
C'est le cri par nous adopté,
Qu'en roulant le tambour répète !
Vive vive la liberté ! Vive vive la liberté ! (...)




Si vous êtes fatigués, faisons halte dans le café dont l'histoire remonte jusqu'en 1869, l'année où Antoni  Blikle fonda sa première pâtisserie. Pendant presque 150 ans, elle a su faire face non seulement à la concurrence des autres pâtissiers mais aussi au régime communiste, régime qui après 1948 bannit toute entité privée de l'industrie et restait hostile à toute activité privée dans le commerce et dans les services. Le café était toujours très populaire parmi les gens de culture: écrivains, acteurs, musiciens... Les étrangers passaient aussi par là. On pouvait par exemple contempler les photos de Marcel Marceau ou de Lucien Boyer accrochées aux murs. Jeune officier Charles de Gaulle y prenait régulièrement le café accompagné des pączki. Dommage que le goût des glaces n'est plus le même que dans mon enfance. Seuls pączki (les beignets) et makowiec (le gâteau au pavot) ont gardé leur ancien caractère... 


Une photo des beignets trouvée sur Internet

Cherchez ensuite le bâtiment au numéro 40. Au début du XX siècle, il y avait ici le plus grand garage de Varsovie tenu par l'entreprise « Centrale de Dion Bouton, Greyer & Co. ». Dans un magasin voisin on pouvait aussi acheter des automobiles de la même enseigne, très connus et aimés des Varsoviens.  Et de l'autre côté de la rue, au numéro 39, il y avait le plus grand magasin où on commercialisait des marchandises russes  de haute gamme, notamment le caviar. L'hôtel appartenait à un des plus riches commerçants de Varsovie, un Russe, Nicolas Szelekhov. Il possédait aussi un autre hôtel, dans l'avenue Ujazdowskie, au numéro 17, où, dans les années 1920, le consulat de France avait son siège.

On peut lire dans les souvenirs écrits à la fin du XIX siècle que les Polonaises portaient peu de faux bijoux. Il paraît que la mode est venue à Varsovie dans la première décennie du XX siècle avec la création, au numéro 45, d'un magasin qui offrait des imitations de diamants sous l'enseigne Bargoin.   À la même époque on a commencé aussi à commercialiser les fausses perles Tecla de production française.
Photo empruntée au site www.warszawa39.pl

À notre gauche – la rue Warecka dont le nom vient de Warka,  la ville natale du colonel Kazimierz Pułaski, un des héros de la guerre d'indépendance des États-Unis. Au carrefour de Warecka et Nowy Świat  son père a fait construire un grand palais en bois.

C'est quelque part ici, dans cette rue, qu'il y avait un appartement occupé par le capitaine Charles de Gaulle qui, entre 1919 et 1920, faisait partie d'une mission militaire française commandée par le général Veygand. C'est pourquoi le général de Gaulle a pu dire dans une allocution télévisée, lors de son séjour officiel en Pologne en  1967: « Je salue ceux d'entre vous qui ont vécu le temps lointain où j'avais été envoyé parmi eux dans ma jeunesse... »; et  cette inoubliable phrase finale que je garde gravée au fond de mon coeur, prononcée par le Président en polonais: « Wszystkim Polakom mówię z głębi serca: Dziękuję Wam! Żegnajcie! Niech żyje Polska, nasz droga, szlachetna, waleczna Polska! ».

Le grand hôtel brunâtre au 67/69, appelé le Palais Zamoyski, fut construit à l'endroit même où au XVII siècle s'élevait un palais appartenant à Marie Anne de la Grange d'Arquien, la soeur de la reine de Pologne, Marie Casimire, femme du roi vainqueur des Turcs près de Vienne en 1683. Au XIX siècle, il fut remplacé par un bâtiment dans lequel on offrait des appartements à louer. En 1863, pendant l'Insurrection de Janvier, plusieurs bombes ont été lancées d'une des fenêtres du bâtiment sur la voiture du général Fiodor Berg, le représentant du tsar pour la Pologne. Berg est sorti intact de cet attentat, mais en représailles tout l'hôtel a été mis à sac par les Cosaques. Tous les meubles ont été jetés par les fenêtres, parmi lesquels le piano de Frédéric Chopin. Le piano qui était dans l'appartement loué par Izabella  Barcińska, une des soeurs du compositeur. Cyprian Kamil Norwid, ami de Chopin, a décrit cette scène dans un poème traduit vers le français par Joseph Pérard :

(…) Regarde !... De ruelle en ruelle
Les chevaux caucasiens se ruent.
Comme avant l’orage les hirondelles,
Bondissant devant les régiments
Par cent ― par cent
― L’édifice a pris feu, semble s’éteindre,
S’embrase encore ― et voici que contre le mur
Je vois des fronts de veuves en deuil
Poussés par des crosses ―
Et de nouveau je vois, tout aveuglé de fumée,
Que par les colonnes du balcon
Un meuble ressemblant à un cercueil
On hisse... il s’abat... il s’abat... Ton piano !




Source: Wikipedia



środa, 1 sierpnia 2012

L'Insurrection de Varsovie 1944





Varsovie, été 1944. Les troupes soviétiques s’approchent. Les Allemands semblent désorientés. Qui va être le maître des lieux? Les autorités polonaises clandestines hésitent. L’enjeu est très important, mais les moyens sont presque nuls. Finalement la décision est prise. Le 1-er août, à 17 heures, commence un grand soulèvement contre les occupants allemands. Son but - libérer la capitale polonaise avant que l'Armée Rouge n'entre dans la ville. 25 000 membres de l’Armée de l’Intérieur (Armia Krajowa), qui était une force clandestine polonaise, et dont 10% à peine était armé, contre 50 000 soldats allemands d’une armée régulière, bien formée et bien équipée, disposant des avions, des chars et de l’artillerie lourde qui n’arrêtait pas de bombarder les quartiers libérés.

Pour un Kowalski, qui est un Durand polonais, l’Insurrection de 1944 est l’indiscutable symbole d’un patriotisme sans limites. La preuve en est dans les foules qui visitent le Musée de l’Insurrection à Varsovie, mais aussi dans le pullullement des groupes d’enthousiastes qui tentent de nous rappeler notre histoire en plein-air. C’est comme une sorte de défoulement après de longues années sous le régime communiste où l’Insurrection était un sujet tabou. Un jeu alors? Une distraction? Non, c’est beaucoup plus!
Les gens qui n’ont jamais connu la guerre dévorent des bouquins d’histoire en y cherchant des informations sur les uniformes et les armes, des détails sur les batailles célèbres et celles tombées en oubli, ou des descriptions de grandes campagnes. Mais un jour, ils s’aperçoivent que la lecture ne leur suffit plus. Ils commencent donc à chercher un moyen leur permettant  de partager cette passion avec autrui. Ils découvrent des forums spécialisés sur la Toile. À force de participer à des discussions, souvent violentes et acharnées, y trouvent des amis et des adversaires. Puis de la vie virtuelle ils passent à la réalité. Des rencontres aboutissent à la création de groupes informels de volontaires qui désirent faire quelque chose auprès d’un grand public. Car ils ont découvert que derrières leurs lectures et leurs discussions se cachent de vrais individus, en chair et en os. Ceux qui ont passé la guerre en civil, et ceux qui ont combattu l’arme à la main.
Ils commencent à les chercher, et trouvent de vieilles dames et des vieillards de 80-90 ans. Comment leur rendre hommage? En faisant découvrir l’histoire de leurs vies aux autres, aux jeunes surtout, à la génération des bandes dessinés et des jeux Pokemon. On organise des rencontres dans des écoles où les jeunes sont confrontés aux gens qui pendant la guerre avaient le même âge. À la grande surprise de certains ça crée des liens.
Les membres des groupes deviennent les successeurs des soldats des groupements de l’Armée de l’Intérieur. Comme ceux qui sont devenus membres de la garde du drapeau du Groupement Radosław. Ils sont 50. La plupart de Varsovie, mais il y en a aussi qui viennent de Puławy, Radom ou Częstochowa. Ils accompagnent les anciens dans leur vie, pendant les fêtes nationales, et trop souvent dans leur dernier chemin...
Mais le grand public réclame une fête. Pourquoi donc pas en profiter? Pourquoi ne pas organiser dans les rues de Varsovie une mise en scène des batailles livrées aux Allemands? Avec de la poudre et une vaste gamme d’effets pyrotechniques on peut attirer l’attention des jeunes vers ce temps où la vie d’un individu ne comptait guère, mais quand le mot « Patrie » gardait toujours son sens profond.
Les autorités municipales leur viennent à la rescousse, comme, par exemple,  dans le cas de la reconstruction de la bataille à  PWPW (l’Imprimerie polonaise des Papiers de Valeur) organisée par la Mairie, la Fondation Polonia Militaris et le Groupement Radosław. En fin juillet 2006, les habitants de Varsovie et les touristes ont pu suivre le cours des évenements du 2 auôt 1944. Une centaine d’acteurs en uniformes et habits de l’époque qu’ils ont dû trouver eux-mêmes, en participant à des enchères sur Internet, en fouillant les marchés aux puces  ou les greniers de famille, et ayant à leur disposition des voitures du temps de la II guerre mondiale telles qu’un véhicule blindé SdKfz 251, un camion Opel Blitz, VW Kubelwagen ou une moto Sahara, présentaient l’attaque des troupes polonaises à l’imprimerie. Une victoire qui a coûté cher.  La mise en scène était accompagnée d’un commentaire simultané de Bogusław Wołoszański, historien, auteur de plusieurs émissions télévisées sur la Seconde Guerre mondiale. Les participants du vrai combat de 1944, Juliusz Kulesza „Julek” et Jerzy Kucharski „Gryf” ont beaucoup apprecié cette manifestation . 
Vivre une telle « aventure » comme acteur, provoque d’inoubliables émotions et agrandit leur passion. Peu importe qu’il y ait des grincheux qui les appellent des héros en collants . La reconstitution des combats n’est pas un jeu de guerre pour les gamins. Elle finit toujours devant un monument qui célèbre les vrais héros de la vraie guerre. Elle est faite pour qu’on ne soit pas obligé d’en dresser de nouveaux. Mais si le sort était malin, on sait que de nouveaux héros se présenteraient à l’appel.

niedziela, 22 lipca 2012

Le Varsovie de Mademoiselle Skłodowska

Varsovie, le 25 novembre 2011. Dans la grande Salle des Bals du Château Royal, on peut assister à la clôture officielle de l'Année Marie Curie proclamée à l'occasion du centenaire de son second prix Nobel. 

Comme toujours dans tels cas, il y a aussi des invités d'honneur. La dame est l'ancien directeur du Centre National de Recherches Scientifiques. Elle est à Varsovie avec son frère, accompagné de sa femme, Anne. Tous les trois: chercheurs et scientifiques. La dame s'appelle Hélène Langevin-Joliot et lui, Pierre Joliot. Ils sont les petits-enfants de Marie Curie. Et le lendemain, j'ai un immense plaisir de leur montrer Varsovie,  de les conduire par les endroits si chers à leur grand-mère ...



Le tombeau familial à Powązki

Nous avons commencé par le vieux cimetière de Powązki. Au troisième rang du quartier 164, on  trouve facilement la tombe où reposent les membres de la famille Skłodowski. La première qui a quitté ce monde est Zofia, l'ainée des filles, morte de typhus à l'âge de 16 ans. Deux ans après, elle est suivie de Bronisława, la mère. Celle-ci, atteinte de tuberculose de l'époque de la naissance de Marie, s'impose désormais un régime dans les contacts avec ses enfants. Elle ne les embrasse plus, ne les caresse pas de peur de les contaminer. C'est tellement dur pour une mère, surtout dans cette famille où l'amour et l'attachement règnent jusqu'à la mort du dernier du « clan ». Ils se retrouvent tous ici, sauf une. Marie repose au Panthéon, à Paris, dans sa seconde patrie qu'elle a choisie pour travailler et vivre.



La rue Freta

C'est une rue qui est connue de tous les touristes qui viennent à Varsovie. Juste à côté de la Vieille Ville qui est un point obligatoire de chaque programme de visite touristique de Varsovie, elle débute devant la fortification dite Barbacane. C'est ici, au numéro 16, que sont nés tous les enfants Skłodowski dont Marie était la cadette. La famille occupait l'appartement au premier étage dans le bâtiment qui fut le siège de l'école pour des jeunes-filles, dirigée par Bronisława.






16, rue Freta, la maison natale de Madame Curie


S'ils déménagent juste un an après la naissance de Marie, le quartier reste cependant très proche à l'enfant. Deux églises qui sont à 200 mètres de la maison, sont celle de Saint Jacques des Pères Dominicains où a eu lieu sa première communion, « journée mémorable, dominée par les serments que s'étaient faites Mania et sa cousine Henriette de ne pas toucher, de ne pas effleurer l'hostie avec leurs dents », et celle de Sainte-Esprit, des Pères Pauliens (une des plus anciennes à Varsovie, dont le premier bâtiment en bois datait du XIV siècle) où les enfants viennent souvent le dimanche écouter la messe célébrée en… allemand.  Mais la première qu'elle a connue, est celle de son baptême, l'église de Notre-Dame à la Nouvelle Ville, fondée en 1411, construite près de l'escarpement de la Vistule d'où une panorama de la rive droite s'étale devant les yeux des fidèles. Marie, adolescente, revient souvent dans cet endroit. Et c'est ici qu'elle a fait ses adieux avec la ville natale avant son départ pour Paris en 1891.


L'église Saint Jacques, le lieu de la première communion de Marie

La rue Nowolipki

Après 8 ans passés dans le plus ancien quartier de Varsovie, Władysław Skłodowski est nommé professeur et sous-inspecteur au collège de la rue Nowolipki (au numéro 11 de l'époque). La famille occupe un spacieux appartement de fonction dans l'annexe de l'école. La vie n'est pas facile. Après l'Insurrection de Janvier  (1863), une forte pression russificatrice est exercée sur la société. La langue polonaise est bannie des offices et des établissements scolaires.  Le professeur  Skłodowski défend souvent ses élèves contre le directeur russe du collège, Iwanow, ce qui va lui couter finalement son poste. « Il y a eu, en automne 1873, la dramatique journée de retour de vacances. En arrivant avec les siens rue Nowolipki, pour reprendre ses fonctions à l'ouverture des classes, M.  Skłodowski a trouvé sur son bureau un pli officiel: par ordre des autorités, ses appointements étaient réduits, son logement de fonctionnaire lui était retiré, ainsi que le titre de sous-inspecteur. » La famille doit donc déménager, comme elle le fera encore plusieurs fois. Pour boucler le budget de la famille, le professeur loue un grand appartement pour tenir une pension pour de jeunes gens. Il se trouvait non loin du collège, au carrefour des rues Nowolipki et Karmelicka. Aucun bâtiment de l'époque n'existe plus. Le quartier se trouvant, entre 1940 - 1943, dans l'enceinte du Ghetto de Varsovie,  a été complètement détruit pendant et après le soulèvement d'avril et mai 1943. Toutes les maisons ont été d'abord brûlées et dynamitées ensuite par les soldats nazis. Un quart de la ville est devenu un plat désert de débris. De nouveaux quartiers y ont été construits dans les années 1950. De nos jours nous pouvons voir une peinture murale réalisée sur la façade de la maison au numéro 11 actuel. Elle est l'une des plusieurs peintures faites en ville pour commémorer l'Année Marie Curie.

11, rue Nowolipki

La peinture murale sur la maison au numéro actuel 11, rue Nowolipki


Avenue Krakowskie Przedmieście

Un touriste visitant Varsovie à la fin de l'année 2011, pouvait voir plusieurs cubes sur lesquels ont été inscrits  les symboles des éléments chimiques. C'étaient surtout des enfants qui se mettaient à courir entre eux en essayant de trouver les deux éléments découverts par Madame Curie: le polonium et le radium.

Rue Krakowskie Przedmieście. Le bâtiment à droite avec une terrasse arrondie sous le toit, c'est l'Hôtel Bristol


Les cubes étaient là où il y avait la première école de Maniusia, celle de la pension de Mlle Sikorska, au carrefour des rues Krakowskie Przedmieście et Karowa, à deux pas de l’Hôtel Bristol et du Palais Présidentiel. C'était une seule année de scolarité qui était heureuse pour la petite fille. Les professeurs compétents, gentils et les élèves plongées dans l'atmosphère patriotique. On leur enseignait aussi les matières défendues par les autorités russes. « L'institutrice peu avenante, les enfants trop sages à qui elle enseigne, en polonais, l'histoire de la Pologne, ont mystérieusement l'air complices, de conjurés. Soudain, comme des complices, en effet,tous ces êtres tressaillent: le grelottement discret d'une sonnerie électrique vient de retentir sur le palier. Deux coups longs, deux coups brefs. » C'est le portier qui prévient que l'inspecteur russe des écoles privées de Varsovie, M. Hornberg, va visiter la classe. Au bout de quelques instants les cahiers et les manuels polonais sont dissimulés dans le dortoir des internes, et vingt-cinq filles regardent de leurs yeux innocents l'inspecteur entrer.



La rue Marszałkowska

Ce n'était plus le cas dans le collège d'état que Marie fréquentait après. Pour les enseignants russes  la Pologne n'existe plus. Il n'y a qu'un Pays près de Vistule et les Polonais ne sont que des sujets du tsar. Les élèves polonais sont donc constamment persécutées. Mais au même temps, pour ceux qui ont l'ambition de faire les études supérieurs après, il est impossible d'abandonner cette école méprisée, car seuls les collèges d'état donnent le droit de se présenter au bac. Alors pour garder l'équilibre, on fait des petits gestes patriotiques, tels de cracher sur le monuments des traîtres, l'obélisque des généraux polonais qui, pendant l'Insurrection de Novembre en 1831, se sont battu du côté de l'armée  russe, contre leurs compatriotes. Le monument se trouvait devant le Palais de Saxe (plac Piłsudskiego actuellement) dont il n'est resté après la II Guerre Mondiale que la partie centrale abritant le Tombeau du Soldat Inconnu.


La Place Saski en 1861 avec le Palais de Saxe et l'obelisque des traîtres au fond


Le collège se trouvait au carrefour de Marszałkowska et Królewska. Si vous y aviez passé un jour de novembre de 2011vous auriez vu des grands roues de vélos anciens. Appelés bicyclettes atomiques elles nous rappelaient que les voyages à vélo étaient la façon favorite du couple Curie de passer leur temps libre à la campagne.



La rue Leszno (actuellement Avenue Solidarności)

Il est difficile de dire précisément  dans quel endroit était la nouvelle maison des  Skłodowski où ils ont déménagé après la mort de la mère. Elle devait être dans la partie entre les rues actuelles : Marszałkowska et l'Avenue Jean-Paul II, tout près de Plac Bankowy, Eve Curie décrivant dans la biographie de sa mère l'église calviniste qui était construite de l'autre côté de la rue Leszno. C'est d'ici que Marie prenait la rue Rymarska pour aller chercher sa mailleure amie Kazia habitant un annexe du Palais Bleu des comtes Zamoyski (rue Żabia). « Lorsqu'elle ne trouve personne au rendez-vous, elle soulève le pesant anneau que le lion de bronze teint dans sa gueule et le retourne sur le nez de l'animal, puis elle continue sa route vers le gymnase. Kazia, en voyant l'anneau, apprend que Mania est déjà passée et que, si elle veut la rattraper, il faut qu'elle se dépêche. »

Les deux petites rues n'existent plus, englouties par la grande place de Banque (plac Bankowy). De même que l'annexe du Palais. Quelle chance que le Jardin de Saxe est toujours sur sa place, avec ses sculptures du début du XVIII siècle, son bassin et un grand jet d'eau près duquel est situé le cadran solaire sur lequel Marie pouvait voir, par le temps ensoleillé, si, par hasard, elle n n'était pas en retard pour l’école.


Eglise calviniste, Avenue Solidarności (ancienne rue Leszno)

Le temps nous pressait, c'est donc avec hâte que nous avons passé devant l'Université de Varsovie dont la Faculté de Philosophie (sic!) lui a discerné le titre de docteur honoris causa, où Madame Curie était présente pour l'inauguration de l'année académique 1921-22, et où elle revient en 1925 pour prononcer un discours sur la radioactivité; devant le Palais Jabłonowski, reconstruit dans les années 1990, qui jusqu'à la fin de la II Guerre Mondiale était le siège de la Mairie et où Madame Curie reçoit en 1925 le titre d'habitant d'honneur de la ville de Varsovie. Sans oublier la Place des Trois Croix (Plac Trzech Krzyży) près duquel, son père a passé la fin de sa vie dans la famille de son fils ainé, Józef, et l'immeuble dans la rue Górnośląska, au numéro 16, où habitaient ses soeurs, Bronisława Dłuska et Helena Szalayowa.


Et vous, si vous venez à Varsovie, n'oubliez pas de passer aussi par la rue Wawelska, dans l'arrondissement de Ochota, pour saluer  Marie Skłodowska-Curie dont la statue se dresse devant Instytut Radowy, « l'enfant chéri » de Marie en Pologne.  


Toutes les citations marquées en italique sont tirées de la biographie écrite par Eve Curie « Madame Curie », Librairie Gallimard, 1958